Source : Spirou n°2545 du 20/01/1987 © Dupuis
Glützenbaum a écrit: Vous connaissez les "Idées noires", de Franquin. Ce que vous ignorez (sauf quelqu'un, quelque part), c'est que deux planches originales des "Idées Noires" ont disparu. Plus précisément, elles ont été volées. Oui, vous avez bien lu : VOLEES !
Ce sont les planches 13 et 16. Car, voyez-vous, même dans le monde sympa de la bande dessinée, on rencontre parfois des malhonnêtes, des rapaces, de sinistres escrocs au regard torve et aux doigts crochus.
Franquin, ça le fiche en boule, ça lui pompe l'air. Nous aussi. Lui, à qui il est arrivé on ne sait plus combien de fois de donner ses planches originales, comme ça, rien que pour faire plaisir, il n'aime pas qu'on les lui vole. Nous non plus.
- Faut surtout pas en parler, lui a-t-on dit. Sinon le malfaisant va se tenir coi.
- Justement, a répondu Franquin. Comme ça, il ne pourra pas les vendre, ni même se vanter de les avoir, ou faire croire qu'il les a achetées, ou qu'il les aurait reçues...
Voilà. C'est quand même triste, non ?

au voleur.
Pour information, Glützenbaum a écrit:Jusqu'à il n'y a guère, avant que l'on se mette à considérer la bande dessinée et ses auteurs - à leur accorder donc la considération qu'ils méritent souvent -, la plupart des éditeurs pensaient de bonne foi que, puisqu'ils les avaient achetées, les planches originales leur appartenaient. A cette époque, il y a vingt ou trente ans, les auteurs eux-mêmes voyaient les choses à peu près de cette façon. Et puis, la BD a cessé d'être un métier d'amateurs qui se spécialisaient doucement en s'amusant beaucoup et en se souciant assez peu de leur avenir. C'est devenu quelque chose de sérieux, oui, Madame. Ou qui peut être pris comme tel. Du coup, les planches originales - les bonnes, en tout cas - ont acquis de la valeur. Les éditeurs en général ont pris l'excellente habitude de rendre leurs planches originales aux auteurs - même les moins bonnes -, ayant découvert qu'ils avaient seulement acheté (ou loué) le droit de les reproduire et qu'une planche originale appartient toujours à celui qui l'a créée. C'est là que les choses ont commencé à se compliquer. Il y a en effet des auteurs qui offrent leurs planches, ou certaines d'entre elles. D'autres qui les vendent. D'autres encore qui se les font voler...
Il y a des amateurs qui achètent des planches originales, des collectionneurs qui paient très cher le plaisir d'en possèder. Il y a des marchands qui en vendent, soit qu'elles leur ont été confiées dans ce but, soit qu'ils les aient eux-mêmes achetées. Et il y a des voleurs qui en volent, pour les garder ou pour les vendre. Dans tous les métiers, il y a des gens honnêtes et des malhonnêtes gens. Et chez les marchands qui vendent des planches originales, c'est pareil. Car il y a des marchands qui vendent des planches en sachant fort bien qu'elles ont été volées. Qu'ils aient dû acheter ces planches très cher pour les revendre plus cher encore ne change rien à l'affaire.
Je dois cependant préciser, par respect pour la langue et pour les marchands honnêtes, qu'il s'agît alors de receleurs. Vous le savez sans doute, la loi punit voleurs et receleurs. Quand on réussit à leur mettre la main au collet...