par marcelinswitch » 30 Nov 2007 11:22
Je tiens d'abord à dire que pour moi le tombeau des Champignac est un bon album. Le meilleur des 3 one-shots sortis, le plus équilibré dans la qualité du dessin et du scénario.
C'est vrai que je suis sorti de ma lecture avec un sentiment mitigé.
En fait, je ne m'attendais pas à un tel album.
On connaît tous la démarche des deux auteurs, et pour nous, il y a de quoi saliver, surtout que cela fait deux ans et demi qu'on attend.
Faire un Spirou dans l'esprit de Franquin, c'est courageux car on s'expose inévitablement à la comparaison mais ici les auteurs échappent à ce piège grâce à leur talent respectif, et à leur propre ton.
On sent bien qu'ils on aimé faire cette histoire.
Je disais que j'étais partagé à la fin de ma lecture. En effet je m'attendais à une grande aventure, comme au bon vieux temps de Franquin, comme "QRM", que les auteurs citent allègrement.
Certes, ils avaient prévenu que "la psychologie des personnages" seraient un peu plus creusé, leur relation les uns aux autres, notamment le fameux trio Spirou-Fantasio-Seccotine.
Mais je ne pensais pas que ce serait le point central de l'album et que l'action passerait au second plan (c'est mon avis).
Du coup, j'ai été un peu déçu par rapport à ce que j'attendais, et j'ai dû changer mon fusil d'épaule pour apprécier cet album.
Il n'est pas facile de dénouer du scénario qui a fait quoi, mais au final, les 2 auteurs étant sur la même longueur d'onde, cela ne change pas grand chose.
Comme le disait Yann en interview, ils se sont amusés à retourner le coffre à jouets pour prendre ce qui leur plaisait: Turbot 1, Zorglumobile (même si les deux n'ont jamais coexisté), costume de groom (oubli marquant et pourtant symbolique: le calot).
Le synopsis de Yann captive le lecteur: une mission impossible; escalader une montagne lointaine du Tibet, le château détruit, une crypte découverte, un ancêtre mystérieux du comte...
Cela ne se révellera finalement pas une grande aventure, comme je l'ai dit mais plutôt une trame dans laquelle on va suivre les éculubrations des personnages principaux.
Ce scénario réutilise la bonne vieille ficelle du "partez au loin mais le trésor est sous vos pieds" qu'avait utilisé Hergé en son temps.
Il y a aussi un parallèle indubitable au prisonnier du Bouddha; les scènes nocturnes au château, Fantasio qui espionne le comte, le départ vers l'Asie, une montagne trouée de grottes à escalader... manque plus que le GAG.
Ces deux éléments, auquel on peut rajouter les "hommages" dilués cis et là tout au longs de l'album pourrait faire penser qu'on a affaire à une histoire "réchauffée".
Détrompez-vous, car l'action n'est pas au centre de cette histoire (d'ailleurs il n'y a pas non plus de méchant(s)) mais en constitue seulement un des éléments. Ce qui fait que les références cités supra ne deviennent pas des handicaps pour l'album.
Les petits hommages, par exemple, ils ne sont pas balourds (quoique je les trouve un peu nombreux). On n'a pas droit à un portait de Franquin ou le sous-marin qui traîne, ostensiblement dessinés. Ce sont des rappels indirects, tout en sous-entendus: le pyjama de Fantasio, les bottes qu'il prend, le poudrier de Seccotine, le facteur Zénobé (apparu une seul fois dans "le repaire de la murène"), le courrier adressé à Duplumier et à Dupilon, réutilisation du X4 et du sérum anti-froid....
Venons-en aux points forts du scénario.
L'idée de s'intéresser à l'histoire familiale du comte est excellente. Faire participer Côme de Champignac à l’expédition d’Egypte avec Napoléon, en faire le premier inventeur de la photographie m’a plu (le caveau à champignon aussi). C’est très historique, on sent la marque de Yann qui aime glisser de telles éléments dans ses scénar’.
L’idée de réutiliser les champignons luminescents de « il y a un sorcier à Champignac » est aussi excellente. Cela accentue le côté mystérieux.
Les 25 premières planches se passant au château sont excellentes. L’ambiance nocturne est très bien rendue. Mais c’est là aussi que l’on se rend compte que l’on aura pas droit à une grande aventure ; les héros restant trop longtemps à Champignac.
On s’intéresse donc aux personnages car finalement cette histoire confère parfois au huis-clos tant le nombre de personnage est limité. On suit de très près le quatuor Spirou-Fantasio-Seccotine-Champignac.
Spirou est un peu en retrait, peut-être un peu plus neutre qu’à l’habitude ; il laisse la part belle à Fantasio qui lui est au meilleur de sa forme dans cet album. Seccotine est redevenu la peste minaudante de « la corne de rhinocéros» en quête de scoop pour doubler Fantasio.
Quant à Champignac, c’est selon moi le gros point noir de l’album. Je ne l’ai pas aimé tel que Tarrin et Yann l’ont représenté. Je ne l’ai pas reconnu. Il est complètement « dingue » dans l’album. Franquin l’a déjà représenté de cette façon dans certaines histoire mais même dans ces passages-là comme dans « la peur au bout du fil » ou « Panade », il gardait une dignité, une noblesse qui faisait sa marque. Tandis que là…
Pourtant sur son blog Tarrin disait : « Pourquoi avant Panade ? Parceque l'univers est trop différent, moins sérieux, ça devient davantage du Gaston, le dessin est devenu plus caricaturale, le comte et Zorglub perdent de leur prestance »
Outre le fait que « le Tombeau » est je trouve moins sérieux (que je classerais donc dans les épisodes post-QRM), dire que le comte perd de sa prestance dans « Panade » et le représenter tel quel dans le Tombeau est selon moi un non-sens.
Spip, et c'est un regret, étant quasiment inexistant, revenant à l'état purement animal (comme dans "Machine qui rêve").
Je ne dirai pas grand-chose sur la sphynge. Mais je me demande si c’était utile d’introduire un animal légendaire. On voit l’appel du pied au Marsu ; mais quand je la vois je n’y crois pas. Surtout que les persos sont à peine étonné de la découvrir.
Concernant le dessin, on n’est pas surpris, c’est du Tarrin.
L’album se décompose en 3 parties, et cela se ressent au niveau du dessin.
La première partie à Champignac et en nocturne est magnifique, Tarrin montre tout son talent avec ses jeux d’ombres. Les décors sont là.
Cela se gâte lorsque nos héros partent pour le Tibet et là le décor se réduit à une peau de chagrin. Je sais bien que l’on est en haute montagne mais quand même. J’avais parfois l’impression de lire le début du « Voyageur du Mésozoïque », peut-être à cause du sérum anti-froid, mais surtout à cause du vide à l’intérieur des cases. Les montagnes tibétaines sont tout sauf impressionnantes. Un des passages agréables, c’est le périple « huilesque » de Fantasio dans la petite bourgade ; cela fait respirer le récit.
On a quand même l’impression que des planches sont bâclées, surtout à la fin, ce qui est dommage pour un album qui a pris son temps.
Concernant les persos, c’est vrai que Seccotine a des faux airs de Violine mais elle est tellement jolie. Bon le comte, j’ai dit ce que j’en pensais. Les autres sont très bien réussis. Mention spéciale à Spirou que Tarrin a bien dans la main.
Comme tout album, il a ses qualités et ses faiblesses. Le tout pris en compte, et comprenant la démarche des auteurs, on a un album qu'on attend depuis "Panade" (je dis bien "Panade") et qu'on est heureux de lire.
Encore une fois, ce n'est pas de la grande aventure, même si celle-ci n'est pas absente de l'histoire. On suit de très près les persos jusqu'à la caricaure ( a couché/ a pas couché) et ça nous fait rire. C'est le principal.