Franquin, Jijé et influences

[Zourbi le Grec]

En ce qui concerne les influences de Franquin, il ne faut pas oublier Walt Disney qui était aussi important que Jijé. D'ailleurs Franquin et Morris ont d'abord fait du dessin animé et lorsqu'ils sont passés à la bd, Franquin a construit toute son œuvre autour de la recherche du mouvement absolu.
A partir de sa première histoire d'importance (Il y a un sorcier à Champignac), Franquin a déjà trouvé son style personnel qui se démarque tout à fait de celui de Jijé. En gros, il a digéré son Jijé et son Disney, pour produire le style élégant et plein de vie qu'on lui connait.

Dans un post précédent, il a été dit que Jijé a créé un style original qui se démarquait de celui de son premier maître, Hergé (voir la série Jojo). C'est oublier que Jijé a été très influencé également par la bd américaine et pas seulement par Milton Caniff comme tous les dessinateurs réalistes de cette époque mais aussi par des gens comme Earl Oliver Hurst (1895 - 1958) par exemple comme le suggère le dessinateur Li-An sur son site (voir galerie sur E.O. Hurst).

[Juho]

Il faut un peu arrêter le prosélytisme, Franquin le premier ne se prenait pas au sérieux!

Comme l'a écrit Juho, sans Jijé je ne sais pas si Franquin aurait eu le même parcours.

J'adore Franquin mais il faut replacer chaque auteur dans son époque et avec les influences de chacun. Je ne pense pas que Franquin a pu influencer Jijé, mais plutôt le contraire.

Sur le sérieux du travail, je pense que les auteurs de cette époque faisait ce métier qui n'était pas sérieux, sérieusement. Il suffit de voir la qualité de leur planche. Que ce soit Jijé, Franquin, Jacobs ou Cuvelier, même si ce dernier était le seul à avoir un mépris pour la BD et aspirait à autre chose (ce qui n'était pas le cas de Jijé ou de Jacobs).

Il est indéniable que Jijé a influencé et formé en partie Franquin et nombre d'auteurs de cette génération mais il ne faut pas être exclusif.
Je pense que la relation Franquin- Morris, riche en échanges sur la BD, a été aussi formatrice que le passage dans le studio Jijé.

De même, comme le dit Franquin; il n'y avait pas de relation maître-élève avec Jijé mais des échanges riches. Franquin disait notamment qu'ils (Morris et lui) lui avaient fait découvrir les auteurs américains qu'ils ne connaissaient pas du tout. De même, ils avaient une expérience du dessin animé que Jijé n'avait pas.

A l'inverse, Jijé, outre son expérience déjà grande dans la BD, a reçu une formation aux arts classiques dont il a pu transmettre l'esprit. C'est notamment pour cela qu'il faisait faire des nus réalistes à ses "p'tits jeunes" alors qu'ils faisaient de la caricature, de la BD humoristique.

Bien sûr, il est certain que ni Jijé, ni Morris ni l'influence du studio CBA ont créé l'apprentissage de Franquin séparemment, c'est un peu de tout cela qui a appris à Franquin les débuts du métier (qui n'en était pas un à l'époque, c'était toute une génération d'auteurs qui faisaient ca pour le plaisir, c'était loin d'etre un métier pour la majorité des auteurs de l'age d'or ).

Et Franquin a lui aussi appris des choses à Jijé, Morris, etc, Jijé et Morris n'ont pas donné des "cours" de quoique ce soit à Franquin, et Franquin n'a donné de "crous" à aucun des deux, c'était un atelier ensemble, chacun faisait évoluer l'autre on confrontait les planches, l'un trouvait que ce truc la aurait été mieux ainsi et on recommencait. C'était réélement un échange et un apprentissage mutuel, même pour Jijé qui était le plus expérimenté au départ.

Je suis convaincu que ce système d'atelier en co habitation est la meilleure chose qui puisse arriver à un jeune auteur. Aujourd'hui, après leur diplome d'art, les jeunes dessinateurs prefèrent bosser chez eux, c'est je pense mois pédagogique, en plus, travailler en équipe, c'est bien plus agréable... Heuresement, ca n'a pas tout à fait disparu!

[Zourbi le Grec]

Voici un autre exemple de dessin de Earl Oliver Hurst qui fait assez Jijéin je trouve :


Le lien de l'image est corrigé

[marcelinswitch]

Je n'arrive pas à voir ton image Zourbi.

Sinon, Juho, quand je parlais d'échanges Morris-Franquin, c'était aussi en-dehors du studio Jijé, en fait avant qu'ils n'y aillent, notamment ces fameuses semaines passées à La Panne dans la maison familiale de Morris, qui furent fructueuses selon les 2 auteurs à l'apprentissage du métier.

[lolodila]

très instructif cet échange... Que de connaissances sur le sujet de la part des participants. Chapeau les gars !

[Rhavikan Tiroupi]

Personnellement j'admire beaucoup Jijé. Je ne pense pas qu'on puisse limiter son influence sur Franquin à ses débuts. Franquin avait besoin de se former à la BD à ses débuts, il lui fallait trouver les bons filons. Des trucs différents de ce qu'il avait acquis chez CBA.

Franquin évoque d'ailleurs souvent Jijé dans ses interviews. Si Franquin a été une référence pour réussir dans la BD (pensons à tous ces jeunes qu'il a épaulé), Jijé a tenu le même rôle our Franquin.

Et puis Jijé a une expérience extraordinaire. Quand je le relis je reste admiratif. Cet homme est incroyable car il a la capacité de jouer dans des univers graphiques complètement différents. Jijé a plusieurs styles opposés qui fonctionnent, ce qui est assez rare chez un dessinateur. Pour cela relisons Valhardi, Jerry Spring, Tanguy et Laverdure, Spirou, Don Bosco et admirons ses illustrations somptueuses (Le comte de monte Cristo). Il a eu une production immense et figure au sommet de la BD, même si Franquin a atteint un niveau encore supérieur.

[Juho]

J'ai souvent entendu dire qu'on reconnait un bon maître à ce que l'élève finisse par dépasser un jour le maître... Faut il dire la même chose pour Franquin/Jijé?

Je ne saurais jamais dire si Franquin fut meilleur que Jijé ou inversemment. J'adore trop les deux pour ca...

[pedroiy]

Jean Giraud a également été l'élève de Jijé... Et on voit où cela l'a mené... Donc, Jijé est indéniablement un très bon maître d'art...